Quatre nouveaux diacres permanents ordonnés pour le service

Ce dimanche 13 juin, Mgr James ordonnera diacres permanents Philippe, Xavier, Pierre et Robert. Témoignage de ces quatre hommes mariés qui reviennent sur leurs parcours de vie et leurs années de discernement et formation en vue de ce ministère.
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Vous serez ordonné diacre permanent le 13 juin prochain pour le diocèse de Bordeaux. Quelles ont été les étapes majeures de votre cheminement, de votre appel jusqu’à cette ordination ?

Philippe Lenormand : Arrivé à Gujan-Mestras en 1999 au terme d’une carrière militaire dans l’Armée de l’Air, je suis né à Paris. J’exerce la profession de cadre de santé pour un laboratoire d’analyses médicales. Père de trois enfants, je suis marié à Sandrine, elle-même infirmière libérale. La perspective de servir l’Église dans le cadre du diaconat permanent est pour moi une grande joie. Lorsque j’ai été appelé, répondre à l’amour du Christ par le don de soi dans le ministère est devenu une évidence. J’engage ceux qui se sentent appelés, tant au sacerdoce qu’au diaconat permanent, à ne pas avoir peur de discerner.
Dieu n’appelle pas les meilleurs, il est humain de se sentir dépassé, mais Dieu rend capables ceux qu’il appelle à son service. Parce que ce qui est de Dieu est beau et bon, je suis attaché à la beauté de la liturgie, c’est comme ça que j’ai accepté il y a maintenant de nombreuses années la responsabilité du service des servants d’autel dans ma paroisse. J’ai également contribué à la catéchèse du primaire, l’aumônerie des collèges, la première équipe d’EAP de secteur, le service des sacristies, et la préparation au baptême avec mon épouse.

Xavier Deval : À Pâques 2016, le Père Jean-Louis Despeaux m’a transmis l’appel vers le diaconat, faisant suite à des interpellations successives pour des formations ou des missions en Église.
Comme souvent lors d’un appel, se pose la question « pourquoi moi ? ». Il y a tant de personnes engagées au service du frère ! L’année de pré-discernement nous fait prendre conscience que nous sommes appelés à nous mettre au service du Christ, tels que nous sommes, mais aimés et pardonnés.
Depuis 2017, les week-ends de formation ont été des moments d’enrichissement et de fraternité, partagés avec Christiane, mon épouse, qui vit pleinement ce cheminement. La retraite ignatienne a été fondatrice. Le groupe d’accompagnement dans sa diversité est une richesse pour tous, un soutien pour nous, et un travail important de discernement pour la mission future.
L’institution des ministères de lectorat et d’acolytat a été célébrée par Mgr Jean-Marie Le Vert dans une Église en joie. Il est important de se sentir accueilli par la communauté vers laquelle je serai envoyé. Ce fut une étape où Christiane et moi avons commencé à mesurer les implications à venir dans nos vies.
Depuis mai, la participation à la préparation de l’ordination se vit dans la fraternité des quatre ordinands. La paroisse est pleinement active pour cette fête. Que de bonnes volontés se mettent en route pour que tout soit beau et que rien ne fasse obstacle à l’Esprit Saint  !
Au fond de mon cœur, je sais que ce chemin vers le diaconat correspond à un désir profond et que tous les charismes participent à la construction du Corps du Christ. Je remercie toutes les personnes qui m’ont conduit dans cette croissance.
Par ma vie de famille et professionnelle et ma présence à l’autel, je dois témoigner que cette charité n’est pas réservée aux clercs ou à des services d’Église. Elle est bien offerte à tous les baptisés qui doivent en vivre dans leur famille et tous leurs lieux de vie et de travail.
Je suis récemment à la retraite ; il faut cependant rappeler qu’être diacre ou avoir une vie « diaconale » en activité professionnelle représente souvent une certaine radicalité, qui peut avoir des conséquences lourdes, lorsqu’elle s’oppose aux valeurs utilitaristes du monde et à la négation de l’humain.
L’engagement de rester dans notre état de vie, même en cas de veuvage, fait également signe pour le mariage qui est sacrement dans son caractère « pour toujours ».
Le geste le plus marquant de la diaconie du Christ est le lavement des pieds. Nous devons sans cesse l’approfondir. Si je veux moi-même faire ce geste en vérité, je dois d’abord l’avoir vécu. Et face au frère blessé, je devrai me rappeler que le plus transperçant n’est pas d’aimer mais de se laisser aimer.
Et si j’entrevois ce cœur blessé commencer à s’ouvrir à l’Amour, ce sera pour moi comme une porte de tombeau qui commence à rouler. Ma joie et mon salaire seront de recevoir aussi la lumière qui en jaillira et d’avoir ainsi participé à la création du monde.

Pierre Duong Van Hoa : Je m’appelle Pierre Duong Van Hoa, je suis né au Vietnam il y a 50 ans, dans une famille de six enfants. Après avoir vécu deux ans dans un camp de réfugiés en Thaïlande, je suis arrivé en France, accueilli par le foyer «Claude Quancard». J’ai obtenu ensuite un CAP d’électroménager. Je n’ai pas fait de grandes études à cause de la situation politique troublée au Vietnam dans les années 80 et 90. Actuellement, je suis agent territorial à la mairie de Mérignac.
En préparant le mariage avec Julie ma future épouse, j’ai découvert la foi catholique et ses grandes richesses. J’ai donc suivi un parcours de catéchuménat afin d’être baptisé en 1999 à l’Église Saint-Martial à Bordeaux.
Marié avec Julie depuis 2000, nous avons 3 enfants : un garçon de 19 ans et deux filles de 14 et 12 ans. Toute la famille est impliquée dans la communauté vietnamienne. Je suis trésorier, ma femme est dans l’équipe des fleuristes et mes enfants servent l’autel.
En 2016, voyant la vie de la communauté vietnamienne avec ses besoins et services, le Père Pierre Nguyen, notre aumônier, m’a proposé de participer à la formation diaconale. Après une année de prière et de réflexion commune avec mon épouse, nous avons répondu favorablement pour débuter la formation diaconale sous l’autorité du Père Alain Dagron et du diacre Philippe Kociemba .
Ce temps de formation a été une grande grâce pour toute notre famille, surtout lors des séjours au monastère pendant mes 1ère et 2ème années de formation, j’ai cependant rencontré beaucoup de difficultés au niveau de la langue française. Après mon admission en vue de l’ordination au diaconat par Mgr Bertrand Lacombe en 2019, mon accompagnateur spirituel m’a permis de rencontrer une personne pour m’aider à améliorer mon français, c’était une nouvelle grâce pour moi étant très préoccupé par cette question.
Avec l’aide de Dieu, le 23 janvier dernier, j’ai été institué au ministère du lectorat et de l’acolytat par Mgr Jean-Paul James. La présence de mon équipe d’accompagnement est aussi un élément essentiel tout au long de mon cheminement. Je rends grâce à Dieu pour l’appel de son Église afin que je sois ordonné diacre permanent au service de son peuple. Je remercie mon épouse Julie et mes enfants : Thibault, Julia et Jade pour leur soutien infaillible malgré les difficultés rencontrées tout au long du parcours. L’ordination n’est pas une fin pour moi, mais un nouveau et grand début pour ma vie chrétienne. Mon français est toujours à améliorer et j’ai encore énormément de choses à apprendre. Que l’esprit de Dieu vienne en aide aux serviteurs que nous sommes !

Robert Capaldi : Je n’ai jamais pensé à être diacre. En fait, c’est le Père Laurent Maunier, mon curé à l’île de la Réunion qui m’a révélé ma vocation. J’y ai vécu dix ans. J’allais à la messe chaque dimanche en famille, sans plus. Puis le Père Maunier a fait des annonces pour rénover la sacristie de la chapelle du Tévelave, village où j’habitais. Quand je suis allé à une réunion des « forces vives », tout était terminé mais on m’a confié la préparation des Adorations animées pour laquelle je n’avais alors aucune compétence particulière. Petit à petit, j’ai accepté d’autres missions paroissiales. Ce que je ne savais pas, c’est que le Père Maunier me mettait à l’épreuve pour discerner ma vocation et un jour, il m’a demandé si je voulais être diacre. J’étais étonné, je n’ai pas dit oui tout de suite. Puis des personnes que je rencontrais en Église se sont mises à me demander si j’étais prêtre ou diacre, d’autres s’adressaient à moi en me disant mon Père… Je me suis alors décidé mais j’avais dépassé la limite d’âge pour la Réunion.
De retour en Gironde, encouragé par le Père Éric Schirck, mon curé à Castillon, j’ai demandé à Mgr Jean-Pierre Ricard qui m’a permis d’entrer en formation diaconale. Ensuite Mgr Jean-Paul James m’a confirmé dans ma vocation.

Comment envisagez-vous cette mission du diacre, dans la dynamique des orientations diocésaines promulguées en 2018 par le Synode?

Xavier Deval : Que seraient nos Évangiles sans les petits, les humiliés, les humbles de cœur et ceux qui acceptent de le devenir. Ceux-ci en sont la chair, la chair du Christ. Que pèsent tous ces petits dans notre monde ?

Dans notre Église, prenons-nous suffisamment en compte cette expérience « d’en bas » pour ce qu’elle est, c’est-à-dire elle-même source de vérité, lieu de rencontre avec ce Christ totalement incarné et présent dans notre humanité, en priorité quand celle-ci est blessée.

L’Eucharistie des Évangiles synoptiques et le service du frère dans celui de saint Jean sont bien deux lieux de rencontre dans la foi avec la présence réelle du Christ.

Les missions de diacre qui me seront confiées par notre Évêque, s’appuieront donc sur les deux piliers de l’Eucharistie reçue et du service du frère donné. Un aller-retour permanent entre l’autel et le monde pour annoncer l’Évangile.

Mes expériences professionnelles et d’Église me rendront très attentif à la place des laïcs, hommes et femmes, ainsi qu’à la construction de la fraternité dans les équipes et avec les prêtres.

Lors de la formation, j’ai été ému de découvrir que la prière consécratoire situait l’institution du diaconat dans le Livre des Actes des Apôtres, au chapitre 6, lorsque « les frères de langue grecque récriminèrent contre ceux de langue hébraïque, parce que les veuves de leur groupe étaient désavantagées dans le service quotidien ».

Les Apôtres mesurent alors les risques pour la communion et agissent de suite : « Les Douze convoquèrent alors l’ensemble des disciples et leur dirent : Il n’est pas bon que nous délaissions la parole de Dieu pour servir aux tables. Cherchez plutôt, frères, sept d’entre vous, des hommes qui soient estimés de tous, remplis d’Esprit Saint et de sagesse, et nous les établirons dans cette charge ».

La paix dans le Christ est la première des vérités que nous avons à partager. Celle-ci fait signe au monde. Quand nous sommes tous guidés par l’Esprit Saint et tendus vers la mission, que de joies et de fruits !

Robert Capaldi : Après l’Exhortation apostolique Evangelii Gaudium de notre Saint-Père, le pape François, les actes synodaux de 2018 ont rappelé leur vocation aux baptisés du diocèse de Bordeaux ; celle justement reçue au baptême qui nous fait prêtres, prophètes et rois, et donc en cohérence avec notre foi des disciples en mission.

Le synode nous propose les trois axes missionnaires suivants : « Permettre la rencontre personnelle avec le Christ ; Vivre la fraternité et la communion, prêter attention à tous ; Rejoindre et accueillir, écouter et appeler, accompagner et témoigner ».

Toutes les dimensions de la diaconie sont ici mises en perspectives et je ferai tout pour m’y consacrer en conformité avec les missions que notre archevêque Monseigneur Jean-Paul James me confiera.

Annoncer, enseigner, transmettre la parole de Dieu et relever les personnes au nom du Christ : En vérité, c’est la plus belle des missions. Je demande donc à mes frères et sœurs dans le Christ de prier avec moi le Seigneur notre Dieu pour que tous ceux qu’Il m’enverra puissent repartir le cœur tout brûlant de sa Parole.

Philippe Lenormand : « L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération, et aux aveugles qu’ils retrouveront la vue, remettre en liberté les opprimés » (Lc 4, 18) Voilà, me semble t-il, ce à quoi nous sommes appelés derrière le Christ. La plus grande des pauvretés de nos sociétés riches et modernes n’est-elle pas justement la perte de l’espérance d’une vie en plénitude avec Dieu ? Dans ces temps de l’omniprésence des moyens de communication, nous n’entendons que plaintes et gémissements, le catastrophisme et la peur l’ont emporté sur l’espérance. Nous devons porter le message d’espérance du Christ, celui de la liberté et de la joie véritable. Difficile, pour la minorité que nous sommes devenus, d’être audible dans cette cacophonie. Pour cela nous devons assumer nos différences, comme jadis le peuple d’Israël sortit d’Égypte. Assumer que nous croyons encore en la suprématie absolue de l’Amour contre celle des armes et la culture de l’individualisme.

Ne cherchons pas le programme, le Christ lui même nous le donne : « C’est à cela que tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres »
(Jn 13, 35). C’est ce qui ressort de notre synode diocésain, c’est encore ce que l’on retrouve au niveau de nos paroisses, nous avons à développer cet esprit de fraternité. Nous ne sommes pas appelés à évangéliser par la force de conviction, nous sommes appelés à être par notre vie, des alter Christus. Nos différences ne doivent pas effrayer, elles doivent susciter l’envie. Malheur à nous si nous sommes gagnés par l’orgueil, la supériorité ou le dédain car ce que nous sommes, ce que nous avons, nous a été donné par grâce et non par mérite. Alors portons haut la joie de l’Évangile car nous dit l’évangéliste :« Vous êtes la lumière du monde. Une ville située sur une montagne ne peut être cachée. Et l’on n’allume pas une lampe pour la mettre sous le boisseau ; on la met sur le lampadaire, et elle brille pour tous ceux qui sont dans la maison. » (Mt 5, 14-15).

Le diacre est au service des pauvretés, il me semble important de nous souvenir que dans les Actes des Apôtres, après avoir reçu l’imposition des mains, on retrouve Étienne et Philippe annonçant la Bonne Nouvelle de Jésus Christ. Pour pouvoir être accueillie, l’annonce, essentielle, de la parole de Dieu, mérite d’être préparée. Une fois encore, je m’appuierai sur un passage de l’Évangile (Jn 5, 1-15) qui a particulièrement marqué mon cheminement. Dans ce passage le paralytique ne reconnaît pas Jésus immédiatement après sa guérison, il est resté recroquevillé sur lui-même, sur sa misère, ce n’est qu’après une seconde intervention du Christ qui lui fait remarquer sa richesse d’être désormais en bonne santé qu’il le reconnaît. L’injonction pour mon ministère est donc celle-ci : aider les accablés à relever la tête afin qu’ils puissent reconnaître le Christ comme leur Dieu et sauveur.

L’Eglise en Gironde


ORDINATION – LE DIRECT DIMANCHE 13 JUIN à 16H00