Au service de nos Sœurs et Frères de la rue

Au service de nos Sœurs et Frères de la rue pendant le confinement du CODIV-19.

Grâce à la mobilisation des bénévoles, l’accueil mobile de nuit du secours catholique Caritas France de Marseille a pu poursuivre ses tournées de nuit pour aller à la rencontre des personnes en situation de rue depuis le début du confinement.

Une rencontre organisée vu les circonstances

Nouvelle tournée, nouvelle organisation : l’accueil mobile s’adapte une nouvelle fois à cette période si particulière. Ce soir nous serons quatre, répartis dans deux véhicules. La préparation est plus que jamais joyeuse. Quel luxe de côtoyer ses amis en ces temps de confinement.Après avoir signé tous les « laissez-passer » nécessaires, suivi la formation sur les consignes à respecter et les gestes barrières, nous partons vers 19 h, récurés, décapés, masqués, gantés et « hydro-gélifiés » !

En partant, nous appelons la boulangerie pour les avertir que nous passerons avant la fermeture de 20 h, pour récupérer les invendus.Nous nous rendons d’abord à Saint-François-Xavier voir notre ami François. Puis arrêt à la boulangerie de Baille qui nous offre généreusement pain, viennoiseries, pizzas et sandwichs. De quoi faire le bonheur de nos amis de la rue….

A la rencontre de nos sœurs et frères de la rue… un challenge de la proximité !

Nous reprenons notre trajet habituel, à savoir : Saint-Giniez, le Rouet/St-Joseph, les Impôts, Europcar, où nous rencontrons nos amis habituels. Il est 20 h et l’ambiance est au rendez-vous, plutôt joyeuse : musique, cris, applaudissements, pétards. On se croirait un 14 Juillet. Nous enchaînons avec la recherche de nos amis isolés et la rencontre de ceux regroupés aux endroits habituels.

On flâne dans le quartier en remontant le Prado par la contre-allée. Nous rencontrons plusieurs personnes isolées, dont une jeune femme, seule, endormie dans un recoin. Nous croisons une autre association qui, n’ayant plus rien à distribuer pour demain, nous explique où aller et comment faire pour servir « ses habitués »…

Puis nous reprenons notre tour habituel : la Timone, Cimetière Saint-Pierre, Préfecture, Palais de Justice, Banque de France. A Castellane, une quinzaine de personnes nous attendent déjà, impatientes.

Au bout d’un mois les règles sanitaires sont connues et acceptées, voire transformées en situations cocasses. Certains résistent : pourquoi ajouter de nouvelles mesures barrières. Ils en ont déjà tellement à franchir ?
Mais tout se passe bien.

Des rencontres pétries d’humanité

Tournee-AMN-covid-19

Nos yeux trahissent notre sourire caché sous un masque et ce sourire nous est rendu. Sans masque.Et puis il y a ces petits moments de grâce : Karim priera pour nous chaque soir du Ramadan, Joëlle nous demande d’aller confiner son Patrick le plus loin possible, Elie demande s’il peut payer ses impôts avec le chèque services… Et puis Youssef nous sourit. Comme toujours…

Le chemin du retour est toujours silencieux. Chacun revit la soirée dans sa tête et s’interroge. Que faire de plus, comment faire mieux et comment répondre à toutes ces inquiétudes ? Nous n’avons malheureusement pas toutes les réponses…
De retour au bercail, nous appliquons les dernières désinfections d’usage selon les consignes.

Notre tournée nous a permis de rencontrer plus d’une cinquantaine de personnes. Nos amis de la rue se sont un peu amusés de toutes les précautions que nous prenons mais se sont prêtés au jeu de bonne grâce. Leur imposer de rester à un mètre de distance les uns des autres est complètement illusoire car ils nous attendent groupés et se rassemblent dès que nous sommes partis.

Se retrouver entre eux, et avec nous, est le seul lien social qu’ils peuvent avoir en ce moment où tout est fermé. Ils sont contents de nous voir. Même si les tournées se sont espacées, on sent que le fil n’est pas rompu grâce aux bénévoles mobilisés qui continuent à servir cette fraternité à laquelle nous tenons tous. Compte tenu de notre accoutrement et des barrières de sécurité, les échanges sont moins longs mais ils permettent de maintenir le lien, prendre des nouvelles de chacun, savoir comment ils sont organisés, leur proposer soupe chaude, café et chèques-services selon les besoins.

Au final nous ferons tous le même constat. Ce soir nous avions l’essentiel : une soupe chaude, un sourire et du respect.

Et le Roi leur répondra : “Amen, je vous le dis : chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait.”

Pierre Atlante

Pierre Atlante, diacre permanent du diocèse de Marseille,